Le GR3 : un millier de kilomètres au fil de l’eau

Mon coup de coeur, Candes Saint Martin

Habituée des chemins de Compostelle, j’ai récemment souhaité découvrir une nouvelle expérience de longue randonnée, relativement différente de celles que j’avais pu vivre jusqu’à présent : suivre un chemin balisé rouge et blanc dans son intégralité, afin de renouer avec une façon de voyager plus lente, où simplicité et contemplation seraient les maîtres-mots. Je suis née (puis j’ai grandi) à Orléans, mais je vis sur la route depuis sept ans. Ainsi, ce fut dans le but d’effectuer un retour aux sources que je me suis laissée appeler par le GR3 il y a quelques mois, comme une évidence. Ce dernier n’est pas seulement une voie de grande randonnée : c’est avant tout un chemin exceptionnel qui combine un patrimoine naturel unique avec un peu de l’Histoire de France. J’ai voyagé à pied tout l’été 2020, déambulant le long des méandres de la Loire durant quarante-quatre jours. Entre le Mont Gerbier-de-Jonc et Saint-Nazaire, j’ai été quotidiennement émerveillée, grâce au fleuve royal qui, kilomètre après kilomètre, a dévoilé sous mes yeux ébahis certains de ses secrets…

Départ au Mont Gerbier

Pour être honnête avec vous, avant de partir, je pensais que mon voyage serait un long fleuve tranquille, à l’image de la Loire qui semble toujours si calme… C’était bien mal connaître ce cours d’eau qui, sauvage et mystérieux, me réservait tout un lot de surprises. J’ai commencé ma marche à 1551m d’altitude, au sommet du Mont Gerbier. S’en suivirent deux semaines d’aventure avec pour mission principale celle de redescendre l’après-midi toute la déclivité que j’avais difficilement gravie le matin (mon rêve de me la couler douce tout l’été s’est donc vite envolé). La suite a évidemment comporté moins de relief.

Premiers pas sur le GR3

 

J’ai toujours profité pleinement de cette expérience hors du temps, et ce ne sont ni les courbatures, ni les ampoules, ni la chaleur estivale qui ne seront parvenues à ternir mon sentiment de gratitude envers le simple fait d’être là, à cet instant précis. En dehors de l’immense liberté qu’offre la marche, l’importante diversité des paysages est ce qui m’a le plus séduite : des monts d’Auvergne aux vignes d’Anjou, en passant par les bocages de Saône-et-Loire ou encore par les grands espaces du Loiret, j’ai été fascinée du premier au dernier jour de mon périple. De plus, les nombreux édifices architecturaux qui décorent les berges de la Loire ont été la cerise sur le gâteau de mon aventure pédestre  (je pense bien évidemment aux châteaux, mais aussi à d’autres vestiges classés à l’UNESCO, comme des églises ou des manoirs). C’est toutefois la vie sauvage ligérienne qui a permis de décupler mon amour pour ce fleuve si singulier. Hérons, aigrettes, castors, ragondins, chevreuils, et toutes sortes d’animaux à deux ou quatre pattes, ont offert à ma lente pérégrination la meilleure compagnie du monde – surtout que je voyageais en solo, dormant sous ma tente, durant près d’un mois et demi. Sans cette faune omniprésente, je me serais certainement sentie bien seule.

La Charité sur Loire avant l'orage

Unique petit bémol, que j’ai pu vivre sur le GR3 : la vitesse folle à laquelle le temps s’est faufilé entre mes doigts. Tandis que je gagnais La Baule, après plus de 1100km parcourus, j’ai eu l’impression d’avoir quitté la veille seulement les hauteurs des monts Ardéchois.

Mon Atrax 2 de chez Ferrino m'accompagne partout
Arpenter un pays pas à pas, en respirer les odeurs et en apprendre les courbes, en caresser les craquelures et en percer les mystères est un luxe qui n’a pas de prix, notamment dans notre société actuelle où tout doit aller toujours plus vite. Cet été, j’ai traversé la France à pied, ayant cette chance inestimable de pouvoir prendre mon temps. J’ai longé la Loire, tombant chaque jour un peu plus amoureuse de ce long ruban bleu. J’ai savouré chaque minute, même les moins agréables, et si c’était à refaire, je ne changerais rien : je m’engouffrerais dans les mêmes embuscades du sentier, je maudirais ces mêmes ampoules aux pieds, je détesterais la pluie jusqu’à sa dernière goutte, et je me perdrais aux mêmes croisements du GR tout comme dans le même labyrinthe de ma pensée. Un voyage réussi doit être imparfait, sinon le train-train quotidien, ennuyeux et insipide, nous volerait cette précieuse flamme, qui anime les yeux de tout randonneur.

En route vers l'océan

Astrid Duvillard
Du blog www.histoiresdetongs.com